Pascal Carzaniga, ex-entraîneur de Dudelange, poursuit sa revue d'effectif. Après le sélectionneur Luc Holtz, le capitaine reconverti dirigeant Thomas Gilgemann et le conseiller Alain Fichant, notre consultant invite Roger Philippi, l'ancien arbitre FIFA, à un échange de questions-réponses. Et toujours sans langue de bois!
Roger, avez-vous l'occasion de suivre de près le championnat de BGL Ligue?
Oui, bien entendu. Et ce d'autant plus que depuis un an je suis en retraite, une retraite bien méritée (rires). Je vois donc de plus en plus de matches, mais pas seulement ceux de mon équipe de Rumelange. Le football reste mon dada.
Vous gardez donc un œil attentif sur l'arbitrage...
Forcément, c'est une ex-déformation professionnelle, même si je n'ai jamais eu le statut d'arbitre professionnel. Quoi qu'il en soit, je surveille le directeur de jeu de très très près.
Estimez-vous que l'arbitrage luxembourgeois est en nette amélioration par rapport à ce que vous avez connu dans les années 1990?
Lorsque j'observe les arbitres lors des rencontres sur lesquelles je me rends, je prends toujours soin de regarder si le directeur de jeu est un jeune arbitre ou un arbitre confirmé, surtout FIFA. Si ce dernier est un arbitre FIFA, je me montre un peu plus pointilleux. Pour l'avoir pratiquée pendant 25 ans, je sais que c'est une activité très très difficile, mais si je prends uniquement le volet "arbitres FIFA", je ne suis pas d'accord sur tout ce qui se fait.
Pensez-vous que, dans un futur proche, nous allons retrouver des arbitres luxembourgeois sur la scène européenne?
Le bât blesse à certains niveaux. Nous possédons de très bons arbitres au pays, mais le niveau de performance exigé au niveau international est tel que nous n'y sommes pas encore. Je dois préciser qu'en premier lieu, à l'étranger, c'est toujours la performance sur le terrain qui est prise en compte mais un tout autre aspect joue aussi. Alain Hamer sait de quoi je parle. Nous sommes présent la veille du match, le jour de la rencontre et le lendemain; nous avons à faire... (après un temps d'hésitation) à des gens très intelligents Il faut aussi savoir, excusez-moi l'expression, se «vendre», dans le bon sens du terme. Il faut se faire respecter.
Quel principal reproche leur faites-vous?
Ils n'ont pas de charisme!
Comment avez-vous trouvé l'arbitrage de la Coupe du monde face aux brutalités qu'on a pu suivre? Auriez-vous réagi de la même manière?
Il y a un mois, j'ai eu l'occasion de rencontrer deux vieilles gloires de l'arbitrage belge: Alex Ponnet et Guy Goethals. Le sujet de conversation a bien sûr été le Championnat du monde et nous avons voulu savoir si nous parlions de la même chose. Nous avions convenu que l'arbitrage avait été assez médiocre. Chacun d'entre nous devait indiquer la situation qui l'avait le plus frappé: fallait-il expulser Sakho (contre l'Equateur)? Ou la blessure de Neymar. Pour ma part, j'ai parlé de la finale, l'action où Higuain regarde le ballon, le dos tourné vers le but allemand, et Neuer qui vient le percuter de plein fouet... l'arbitre siffle un coup franc direct contre l'Argentin qui n'a commis aucune faute! Et là nous parlons d'une finale de Coupe du monde, c'était penalty et minimum carton jaune pour le portier allemand! Ça change tout!
Lors des compétitions internationales, la FIFA donne des consignes d'un côté, mais veut retrouver les grandes nations le plus loin possible en phase finale...
La FIFA a besoin des grandes nations pour bien vendre le football dans le monde entier. Avant le coup d'envoi du Mondial, M. Blatter, en personne, s'est occupé de distribuer les consignes aux arbitres. Dès lors, n'est-il pas indirectement responsable de la mauvaise prestation des directeur de jeu? M. Blatter est un personnage qui n'a jamais eu un sifflet en bouche. Est-ce à lui de dire: «Allez-y doucement avec les cartons, et surtout avec les rouges». Le résultat, on le connaît maintenant. Je me suis toujours posé des questions sur la désignation des arbitres pour des matches concernant les pays organisateurs.